Il va, depuis toujours, recherchant un abri,
Un regard accueillant, mieux encore, un ami
A moins qu’Il ne soit… un coeur guettant sa proie.
Là-bas une porte s’ entr’ ouvre. Il aperçoit
La couronne dorée et la soupe fumante
Et la tranche de lard qui toujours est tentante.
En lui l’espoir grandit, Dieu, qu’Il a donc faim !
Faim ? oui de l’amour des hommes, plus encore que de pain.
La femme de céans au ménage s’obstine
Elle feint de ne pas voir l’homme à la triste mine
De son bâton Il frappe. Il attend… mais en vain
Elle, pour toute réponse, va lâcher ses chiens.
Il s’en va. Bien plus lourd est le poids qu’il traîne
Et pourtant, plus ardent, l’amour qui l’enchaîne.
Une fumée qui monte, en s’échappant d’un toit
Fait penser à la bûche qui dans l’âtre flamboie
A la flamme dorée qui chasse les frissons
Et met de la chaleur dans toute la maison.
Une ombre se profile, disparaît aussitôt.
On devine un regard derrière le rideau
Mais le verrou qui claque, à son tour, répond : non
Il part avec le froid, la faim, ses compagnons,
Mais aussi cette flamme qui toujours le dévore
A laquelle il répond : oui… toujours… plus encore.
Le voilà attiré vers ce lieu, loin des villes,
Où se sont installés roulottes, bidonvilles
Là est le refuge de tous les miséreux
Des parias du coin, des hors la loi et des gueux ;
Ils mettent en commun leur misère et leur faim
Et vivent le présent sans songer à demain.
Une femme, accroupie sur la terre glacée,
Casse de ces cageots sur les marchés laissés.
De son haleine chaude elle souffle sur ses doigts
Comme pour essayer d’en chasser le froid.
Elle voit l’Inconnu, l’appelle de la main
Pousse la porte et tout simplement lui dit : Viens !
(il entre chez elle)
« O femme, lui dit-il, que ton geste m’émeut
De ma détresse immense je t’en fais l’aveu :
Je n’ai rien, je suis seul et par tous éloigné.
Je ne t’implorais pas, c’est toi qui m’ a convié
Ton coeur s’étant ouvert, tu m’as ouvert ta porte,
Tu m’as donné d’abord l’amour qui réconforte
Puis la douce chaleur qui ramène la vie
Dans un corps glacé dont la chair est meurtrie
Je te donne en retour tout l’Amour de ton Dieu,
Le bonheur éternel, le partage des Cieux
Cette félicité déjà tu la détiens
En t’ouvrant mes bras je te dis à mon tour : « Viens ! »
Nov.71